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Le Xinjiang à partir de 1911
Sources :
Andrew D.W. Forbes : Warlords and Muslims in Chinese Central Asia, a political
history of republican Sinkiang 1911-1949 (Cambridge, 1986)
Rémi Castets : Opposition politique, nationalisme et islam chez les Ouïghours
du Xinjiang, CERI, 2004
1884 | Après la révolte de Yaqub Beg
(1864-1877) et la crise sino-russe de l'Ili (traité de Saint-Pétersbourg,
1881), le Xinjiang devient officiellement une province de la Chine en
1884. |
1911 | Yang Zengxin est nommé
gouverneur du Xinjiang par le Président de la République chinoise Yuan
Shikai après la chute de la dynastie des Qing. Il dirige la province en autocrate et comme un seigneur de la guerre. Il s'appuie sur les Britanniques représentés par leur Consul Général à Kashgar pour lutter contre l'influence des Soviétiques à partir de 1917. |
1924 | Établissement de relations diplomatiques entre la Chine et
la Russie. Des consulats soviétiques sont installés dans 5 villes dont
Urumqi et Kashgar. |
1928 | Le gouverneur Yang
Zengxin est assassiné. Un nouveau Président de la province du Xinjiang, Jin Shuren, lui aussi véritable seigneur de la guerre, est nommé par le Guomindang (parti nationaliste chinois de Chiang Kai-shek) qui exerce alors le pouvoir en Chine depuis Nankin. |
1930 | Jin Shuren annexe le
khanat de Kumul (ou Hami) qui était jusqu'alors autonome ; il déclenche
une révolte des Ouïghour menés par Khoja Niyas
et Yulbars Khan, lesquels font appel
à Ma Zhongying, un seigneur de la
guerre du Gansu, chef des Dounganes (ou Hui, Chinois musulmans). Ce
dernier est vaincu. L'emprise économique de l'URSS s'accroît (chemin de fer Turksib, compagnie de commerce Sovsintorg "soviet sinkiang trade company"). |
1932 | Jin Shuren réprime une
révolte des Kirghiz près de la frontière avec l'aide des Soviétiques. Ma Fuming, général doungane, s'allie aux rebelles dans la région de Turfan. La révolte s'étend au Sud. |
1933 | La ville de Kashgar et donc le sud du Xinjiang, tombent aux
mains des rebelles. Des dissensions apparaissent entre les rebelles (Dounganes, Kirghiz et Ouïghour) ; finalement le pouvoir revient aux Émirs de Khotan (Mehmet Emin Bughra). Au nord, la ville d'Urumqi est attaquée par les Dounganes commandés par Ma Shih-ming. La ville est sauvée par le nouveau Commandant en chef de la province, Sheng Shicai. Jin Shuren à la fois incompétent et corrompu, est chassé en URSS par les Russes Blancs. Sheng Shicai est désormais en titre sinon en fait, la maître du Xinjiang après sa nomination au titre de Commissaire à la Défense de la Frontière par le Guomindang. Mais Ma Zhongying revient en scène ; il prend Kumul (Hami) et attaque Urumqi, aidé par le gouverneur militaire de l'Ili. Il essaie d'obtenir l'appui du Guomindang contre Sheng Shicai. Pendant ce temps, les Émirs établissent à Kashgar en novembre 1933 la République islamique du Turkestan oriental, fondée sur la sharia (loi islamique). Le Président en titre est Khoja Niyas, le Premier Ministre est l'émir de Khotan, Mehmet Emin Bughra. Beaucoup de ministres sont proches du mouvement réformiste djadid. Mais cet état, qui s'oppose aux Dounganes et aux Soviétiques, ne pourra pas survivre malgré l'appel à une entente avec les Britanniques. Devant le double danger, au Nord et au Sud, Sheng Shicai prend la décision de s'allier avec l'URSS en décembre 1933. L'URSS, qui craint l'emprise des Japonais dans cette partie de l'Asie, accepte l'alliance. |
1934 | En janvier 1934 les troupes soviétiques passent la
frontière et attaquent les troupes dounganes dans la région de l'Ili. Ma
Zhongying est repoussé d'Urumqi, il part vers le Sud, prend
Kashgar au nom du Guomingang, et liquide les Émirs ainsi que la
République qu'ils avaient formés ( 6 février 1934). Par un revirement qui ne s'explique pas, Ma Zhongying s'allie aux Soviétiques et disparaît en URSS, où semble-t-t-il, un poste honorifique lui aurait été confié. Sheng Shicai reprend alors Kashgar et négocie une trêve avec les Dounganes. A partir de cette date et jusqu'en 1937, Ma Hushan (autre seigneur de la guerre et frère de Ma Zhongying) établit une sorte d'État dans l'État, avec Khotan pour capitale, État doungane ("Dounganistan"), avec des sujets turcs (ouïghour) à administrer et fidèle au Guomindang. Sollicitées par Sheng Shicai, l'aide et la présence des Soviétiques est de plus en plus importante au Xinjiang. Pour Staline cette région constitue un glacis utile à la défense de l'URSS. L'ethnonyme "ouïghour", après avoir disparu pendant plus de 500 ans, est remis en vigueur au cours des années 1930 par l'URSS. La fracture entre nationalistes prosoviétiques et nationalistes panturquistes s'accentue. Ces derniers rejoignent le Guomindang ( c'est le cas de Mehmet Emin Bughra ou d'Isa Yusuf Alptekin). |
1937 | Une révolte éclate dans le Sud en vue de rétablir une
république turque islamique. Les Japonais soutiennent Mahmud Shih-Shang,
en vue d'installer sans doute un nouveau Manchukuo. Mais ce prétendant
s'enfuit. Sheng Shicai demande à
l'armée soviétique d'intervenir. L'Armée Rouge intervient, reprend Kashgar et met fin du même coup au Dounganistan et aux révoltes du Nord (Kucha et Kumul). Août 1937 : signature du pacte de non-agression sino-soviétique (dirigé contre les Japonais), ce qui conforte la mainmise des Soviétiques sur le Xinjiang, du point de vue militaire aussi bien qu'économique (exploitation du pétrole, des mines d'étain etc...). Sheng Shicai va à Moscou en 1938 et devient membre du PC de l'Union Soviétique. |
1941-1944 | En décembre 1941 les États-Unis entrent en guerre aux
côtés de la Chine nationaliste. Sheng Shicai change
de camp et se range à nouveau aux côtés de la Chine nationaliste. En juin 1943 les troupes du Guomindang entrent dans le Xinjiang. En octobre 1943 les troupes soviétiques ont quitté ce territoire. En août 1944 suite aux victoires des Japonais, Sheng Shicai arrête des membres du Guomindang, lequel riposte en le démettant de ses fonctions et en l'envoyant dans une nouvelle fonction à Chongqing. |
1944 | Wu Zhongxin est le
nouveau Président du Gouvernement Provincial du Xinjiang. Il encourage
les Han à s'installer au Xinjiang. Les troubles ont repris dans le Nord, région de Kuldja (Yining), tout d'abord à l'instigation des Kazakhs en 1943, conduits par Osman Batur qui s'empare de la Dzoungarie, avec l'aide de la République Populaire de Mongolie et de l'URSS. La révolte s'étend dans la vallée de l'Ili. Un "Comité national de libération du peuple turc du Xinjiang" est créé en 1943 à Alma-Ata (Kazakhstan) par les soviétiques. Un leader ouïghour apparaît : Ahmetdjan Kasimi. Le 12 novembre 1944 la République du Turkestan oriental est créée dans la région de l'Ili, capitale Kuldja (Yining) avec comme Président l'ouzbek Ali Khan Tore, le pouvoir réel restant aux mains de Ahmetdjan Kasimi. La Dzoungarie se joint au nouvel État. Deux tendances contradictoires animent cet État : une tendance soviétique (avec Saifuddin Azizov, un Ouïghour membre du Parti communiste soviétique), et une tendance musulmane. |
1945 | L'Armée Nationale de l'Ili (armée de la République du
Turkestan oriental) conquiert des positions en direction d'Urumqi et des
oasis du bassin du Tarim (prise d'Aksu et de Tashkurgan). En novembre 1945, revirement de situation : l'envoyé du Guomindang, le général Zhang Zhizhong conclut un cessez-le-feu avec les rebelles en accord avec l'URSS. Un traité de paix est signé en juin 1946. Fin de la République du Turkestan oriental. |
1946 | Une nouvelle administration chinoise (qui allie les cadres de
la République du Turkestan oriental et l'administration pro-Guomindang du
reste du Xinjiang) est mise en place au Xinjiang avec Zhang
Zhizhong comme Président de la province et Ahmetdjan
Kasimi comme Vice-Président. Font également partie du
Cabinet, des membres du "Comité national de libération du peuple
turc du Xinjiang" (dont le Tatar Burhan
Shahidi et les Ouïghour Masud Sabri,
Isa Yusuf Alptekin et Mehmet
Emin Bughra). Ce Comité continue à gouverner directement la
zone frontalière du Nord appelée "les Trois Régions", en
liaison avec l'URSS. |
1947 | Les Kazakhs et leur chef Osman
Batur font sécession. Des révoltes éclatent dans le Sud et
à Urumqi. Zhang Zhizhong est finalement remplacé par Masud Sabri, premier gouverneur du Xinjiang à ne pas être d'ethnie han. Mais il n'est qu'une marionnette aux mains du Guomindang, le pouvoir se disloque et une partie du gouvernement s'installe à Kuldja (Yining). |
1948 | Des combats opposent les troupes de Masud
Sabri et les révoltés du Nord
basés à Kuldja soutenus par l'URSS. Pendant ce temps, l'Armée de Libération Nationale de Mao Zedong est en train d'obtenir la victoire. Burhan Shahidi remplace Masud Sabri comme Président du Xinjiang, avec Saifuddin Azizov comme bras droit. |
1949 | Burhan Shahidi
fait allégeance au Parti Communiste de Chine le 24 septembre
1949. Le 1er octobre 1949 la République Populaire de Chine est proclamée à Pékin. Zhang Zhizhong rejoignit les rangs du PC chinois. Ahmetdjan Kasimi mourut dans un mystérieux accident d'avion en 1949, alors qu'il se rendait à un congrès à Pékin. Le nationaliste ouïghour Mehmet Emin Bughra s'enfuit en Turquie, de même que Isa Yusuf Alptekin qui y créa une organisation d'émigrés ouïghour. Ce dernier mourut en 1995 à Istanbul. Son fils Erkin Alptekin fonda en 1991 à Munich, l'Union des Turkestanais d'Europe. Le nationaliste ouïghour Yulbars Khan s'enfuit à Taïwan en 1951. Le chef kazakh Osman Batur fut capturé et exécuté en 1951. Masud Sabri fut arrêté en 1951 et mourut en prison. |
1955 | La région du Xinjiang est réorganisée. Elle porte
désormais le nom de "Région autonome ouïghour du Xinjiang". |
1962 | Exode de populations depuis la région chinoise de l'Ili
vers l'URSS. |
1981 | Émeutes en 1980 et 1981 à Kashgar et à Aksu. Réouverture des frontières sino-russes et normalisation des relations entre la Chine et l'URSS en 1983. |
1990 | Insurrection de Baren, dans le district d'Artush de la
région autonome kirghiz (nord-ouest de Kashgar). |
février 1997 | Événements de Kuldja (Yining) : arrestations de leaders des
meshrep (qui sont des réunions populaires d'une trentaine de personnes).
Ces arrestations provoquèrent une émeute, suivie de répression. Trois bombes explosent à Urumqi, une bombe à Pékin. |
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Ahmetdjan Kasimi (1914-1949) |
Ali Khan Tore (1885-1976)
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Osman Batur ( 1890 - 1951 )
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Isa Yusuf Alptekin (1901-1995) |
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Revers : en chinois, dang hongqian ershi wen, «valant 20 hongqian», deux drapeaux croisés, celui du Guomindang et celui de la République du Turkestan Oriental, en bas, en turc 20 dâçên « 20 pièces». Cuivre, Ø 33 mm, 12,92 gr. Coll. Hakkim Bey. Voir François Thierry, «Les Monnaies du Turkestan Oriental 1933-1934», BSFN 1990-8, 907-910, fig. 2, 3 et 4. | Droit : en bas, en turc, Sharkî Turkestan cumhuriyet islâmiye, zarp Kashghar, «République Islamique du Turkestan Oriental, frappé à Kashghar», au centre, dans la couronne de laurier surmontée d'un croissant et d'une étoile, sene 1352, «année 1352 (1933)». |
1933 : Monnaie de la République Islamique du Turkestan Oriental (source : http://www.transasiart.com/Numismatique/numismatique_chine/republique/ncnrepxj04b.htm) |
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